Tu ne crains la fureur de ma plume animée,
Pensant que je n’ai rien à dire contre toi,
Sinon ce que ta rage a vomi contre moi,
Grinçant comme un mâtin la dent envenimée.
Tu crois que je n’en sais que par la renommée,
Et que quand j’aurai dit que tu n’as point de foi,
Que tu es affronteur, que tu es traître au Roi,
Que j’aurai contre toi ma force consommée,
Tu penses que je n’ai rien de quoi me venger,
Sinon que tu n’es fait que pour boire et manger :
Mais j’ai bien quelque chose encore plus mordante.
Et quoi ? l’amour d’Orphée ? et que tu ne sus onc
Que c’est de croire en Dieu ? non. Quel vice est-ce donc ?
C’est, pour le faire court, que tu es un pédante.
Les Regrets, 1558
Commentaire (s)
Déposé par Cochonfucius le 23 juillet 2019 à 17h40
La plume sans encrier
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Par je ne sais quels sorts ma plume est animée,
Car il lui faut toujours chanter je ne sais quoi ;
Et mon vocabulaire est plus savant que moi,
Par qui sont la sagesse et l’audace mimées.
Or, je veux être ainsi, rimeur sans renommée,
Qui dans cette espérance ai mis toute ma foi ;
Ainsi, jour après jour, faible et forte à la fois,
En ce jeu d’écriture est ma vie consommée.
Tu penses qu’il vaut mieux des plaisirs vendanger,
Bâtir une maison, courir, boire et manger ;
Mais j’aime cent fois plus ma muse décadente.
Or, que peut faire ici la muse avec le porc?
Comment interpréter cet étrange rapport ?
J’en sais une raison, qui n’est pas évidente.