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Déposé par pich24 le 31 décembre 2016 à 12h58
L’Aveugle
J’ai toujours préféré les ombres aux lumières
Mais je dois avouer le mal voir de mes yeux ;
Quand ils disent leur peine et leur misère aux cieux,
Leurs larmes ne font pas pleurer dans les chaumières.
Je n’ai jamais rien su de mes amours premières :
Des touchers, des frissons, souffles silencieux…
De qui provenaient-ils ? De déesses, de dieux
Ou de simples mortels embrassant mes paupières ?
Les sens procèdent-ils de l’essence de l’être ?
Cernent-ils un présent comme on le fait d’un fait ?
Pour un jour, à me voir, j’aimerais me connaître.
Cette image qu’on voit cette image qu’on sait,
Je n’imagine pas en devenir le maître.
Alors que fait l’aveugle ? Il écoute et se tait.
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Déposé par Jadis le 31 mars 2020 à 17h45
Chez l’Ogre
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Sous la porte glissait un rayon de lumière
Comme le fil mauvais d’un poignard insidieux.
Une lune sanglante incendiait les cieux,
Un silence mortel régnait dans la chaumière. (1)
Silence ? Que non pas. La rumeur singulière
Qui transperçait la nuit de son flot rocailleux,
C’était, dans ce décor terrifiant et odieux,
Le ronflement puissant de l’Ogre et sa rombière.
Soudain, entre ces murs noircis en bois de hêtre,
Taciturnes témoins d’un horrible forfait,
On entendit grincer faiblement la fenêtre.
Avec ses six frangins, ce gredin de Poucet
S’esbignait prudemment, après son coup de maître ;
Mais l’Ogre était bourré et s’en contrefoutait.
(1) Brrr !
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Déposé par Péguyfucius le 29 avril 2021 à 18h48
(Un sonnet de Péguy, un de Cochonfucius)
(a) L’Aveugle I/II
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Sept villes se vantaient d’avoir produit Homère.
Mais il n’était pas né dans les sept à la fois.
Smyrne l’avait nourri dans le fin fond des bois.
Chios l’avait bercé dans les bras de sa mère.
Colophon n’en tira qu’une gloire éphémère.
Salamine avec lui brisa le roi des rois.
Rhodes l’avait trempé dans le respect des lois.
Argos l’avait frotté du sang de la Chimère.
Nous le donnerons donc à la septième Athènes,
La seule où l’on soit sûr qu’on ne l’ait jamais vu.
Les naissances d’avant sont toujours incertaines,
Les fils d’après font seuls que le père est pourvu.
Père, voici tes fils, tous ces grands capitaines,
Et le cortège unique une fois entrevu.
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(b) Un érudit
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Un érudit cherchait le lieu natal d’Homère ;
Il interrogeait donc des gens dignes de foi ;
Avec Alphonse Allais un peu de bière il boit,
Parlant de ce grand barde et de sa digne mère.
« L’état civil fut-il établi par un maire ? »
Alphonse, le subtil, doute que cela soit ;
Nulle cité, jadis, n’avait de telles lois,
Beaucoup de papyrus ne furent qu’éphémères.
Or, puisque nous savons que ce n’est pas Athènes,
Nous pourrons bien choisir Allaure, c’est tout vu.
Foi d’Alphonse, je dis que la chose est certaine.
Ne soyez pas surpris par ce nom imprévu,
« Homèr’ d’Allaure » est dit par un grand capitaine
Quand il se voit perplexe, ou pris au dépourvu.
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Déposé par Cochonfucius le 30 avril 2021 à 13h49
Oiseau des contrejours
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Son corps me semble noir sur un fond de lumière,
Son ombre fugitive est là, devant mes yeux ;
Je ne sais pas nommer cet habitant des cieux,
Il se peut que ce soit l’aronde printanière.
D’aucun petit terroir elle n’est prisonnière,
Mais selon sa plaisance, elle change de lieu ;
Homère la disait messagère des dieux,
Son nid est apposé au mur de ma chaumière.
Elle ne débat point de l’essence et de l’être,
Elle met à profit chaque jour que Dieu fait,
Trouvant quelques trésors pour sa soif de connaître.
Sa voix parfois s’élève et dit ce qu’elle sait,
Telles sont les façons de cet oiseau sans maître ;
Sur tout ce qu’elle ignore, on voit qu’elle se tait.
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Déposé par Cochonfucius le 21 octobre 2021 à 12h43
Les sept disques
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Tu vois sur ce blason sept reflets planétaires,
Ceux de ces corps guidés par une juste loi ;
Au tourteau mercurien le goût d’un fruit des bois,
Son frère vénusien semble une orange amère.
Pour le tourteau terrien, la fragrance éphémère,
La saveur du martien évoque on ne sait quoi ;
Le lourd disque jovien étonne par son poids,
Le tourteau saturnien est comme une chimère.
Nul ne contestera la grâce de Neptune,
Astre fort éloigné, rarement entrevu,
Que poursuit dans le ciel un cortège de lunes.
D’un fier besant d’argent notre monde est pourvu ;
La Lune de chez nous, qui n’est pas trop lointaine,
Vient se baigner le soir dans l’eau de nos fontaines.
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Déposé par Cochonfucius le 28 novembre 2022 à 11h19
Flamant gris
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Cet échassier arpente une lointaine terre,
Il ne craint pas le loup, ni le goupil sournois ;
Il est par les étangs nourri comme il se doit,
Il est fort satisfait de sa vie solitaire.
Il capture parfois des éphéméroptères,
Car il en est gourmand, je ne sais pas pourquoi ;
C’est un piètre gibier, fretin de peu de poids,
Mais ne discutons pas ses goûts alimentaires...
Des oiselles, son coeur n’en voulut choisir qu’une ;
Leur rencontre, ce fut un bonheur imprévu,
Ils ont refait le monde, ensemble, sous la lune.
Ils furent, au printemps, de beaux enfants pourvus,
Ça fait un beau vacarme, ils sont une vingtaine,
Tu les vois patauger dans l’eau de la fontaine.
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