Lautréamont(1846-1870) Les Chants de Maldoror(1869) Chant premier +Chant deuxième +Chant troisième +Chant quatrième +Chant cinquième ×Quе lе lесtеur nе sе fâсhе pаs соntrе mоi... Jе vоуаis, dеvаnt mоi, un оbјеt dеbоut sur un tеrtrе... L’аnéаntissеmеnt intеrmittеnt dеs fасultés humаinеs... Ô pédérаstеs inсоmpréhеnsiblеs... Chant sixième + |
LautréamontLes Chants de Maldoror, 1869
Ô pédérastes incompréhensibles, ce n’est pas moi qui lancerai des
injures à votre grande dégradation ; ce n’est pas moi qui viendrai jeter
le mépris sur votre anus infundibuliforme. Il suffit que les maladies
honteuses, et presque incurables, qui vous assiègent, portent avec elles
leur immanquable châtiment. Législateurs d’institutions stupides,
inventeurs d’une morale étroite, éloignez-vous de moi, car je suis une
âme impartiale. Et vous, jeunes adolescents ou plutôt jeunes filles,
expliquez-moi comment et pourquoi (mais, tenez-vous à une convenable
distance, car, moi non plus, je ne sais pas résister à mes passions)
la vengeance a germé dans vos cœurs, pour avoir attaché au flanc de
l’humanité une pareille couronne de blessures. Vous la faites rougir de
ses fils par votre conduite (que, moi, je vénère !) ; votre prostitution,
s’offrant au premier venu, exerce la logique des penseurs les plus
profonds, tandis que votre sensibilité exagérée comble la mesure de la
stupéfaction de la femme elle-même. Êtes-vous d’une nature moins ou plus
terrestre que celle de vos semblables ? Possédez-vous un sixième sens qui
nous manque ? Ne mentez pas, et dites ce que vous pensez. Ce n’est pas
une interrogation que je vous pose ; car, depuis que je fréquente en
observateur la sublimité de vos intelligences grandioses, je sais à quoi
m’en tenir. Soyez bénis par ma main gauche, soyez sanctifiés par ma main
droite, anges protégés par mon amour universel. Je baise votre visage,
je baise votre poitrine, je baise, avec mes lèvres suaves, les diverses
parties de votre corps harmonieux et parfumé. Que ne m’aviez-vous dit
tout de suite ce que vous étiez, cristallisations d’une beauté morale
supérieure ? Il a fallu que je devinasse par moi-même les innombrables
trésors de tendresse et de chasteté que recélaient les battements de
votre cœur oppressé. Poitrine ornée de guirlandes de roses et de
vétyver. Il a fallu que j’entr’ouvrisse vos jambes pour vous connaître
et que ma bouche se suspendît aux insignes de votre pudeur. Mais (chose
importante à représenter) n’oubliez pas chaque jour de laver la peau de
vos parties, avec de l’eau chaude, car, sinon, des chancres vénériens
pousseraient infailliblement sur les commissures fendues de mes lèvres
inassouvies. Oh ! si au lieu d’être un enfer, l’univers n’avait été qu’un
céleste anus immense, regardez le geste que je fais du côté de mon
bas-ventre : oui, j’aurais enfoncé ma verge à travers son sphyncter
sanglant, fracassant, par mes mouvements impétueux, les propres parois
de son bassin ! Le malheur n’aurait pas alors soufflé, sur mes yeux
aveuglés, des dunes entières de sable mouvant ; j’aurais découvert
l’endroit souterrain où gît la vérité endormie, et les fleuves de mon
sperme visqueux auraient trouvé de la sorte un océan où se précipiter !
Mais, pourquoi me surprends-je à regretter un état de choses imaginaire
et qui ne recevra jamais le cachet de son accomplissement ultérieur ? Ne
nous donnons pas la peine de construire de fugitives hypothèses. En
attendant, que celui qui brûle de l’ardeur de partager mon lit vienne me
trouver ; mais, je mets une condition rigoureuse à mon hospitalité : il
faut qu’il n’ait pas plus de quinze ans. Qu’il ne croie pas de son côté
que j’en ai trente ; qu’est-ce que cela y fait ? L’âge ne diminue pas
l’intensité des sentiments, loin de là ; et, quoique mes cheveux soient
devenus blancs comme la neige, ce n’est pas à cause de la vieillesse :
c’est, au contraire, pour le motif que vous savez. Moi, je n’aime pas
les femmes ! Ni même les hermaphrodites ! Il me faut des êtres qui me
ressemblent, sur le front desquels la noblesse humaine soit marquée en
caractères plus tranchés et ineffaçables ! Êtes-vous certain que celles
qui portent de longs cheveux, soient de la même nature que la mienne ?
Je ne le crois pas, et je ne déserterai pas mon opinion. Une salive
saumâtre coule de ma bouche, je ne sais pas pourquoi. Qui veut me la
sucer, afin que j’en sois débarrassé ? Elle monte... elle monte
toujours ! Je sais ce que c’est. J’ai remarqué que, lorsque je bois à la
gorge le sang de ceux qui se couchent à côté de moi (c’est à tort que
l’on me suppose vampire, puisqu’on appelle ainsi des morts qui sortent
de leur tombeau ; or, moi, je suis un vivant), j’en rejette le lendemain
une partie par la bouche : voilà l’explication de la salive infecte. Que
voulez-vous que j’y fasse, si les organes, affaiblis par le vice, se
refusent à l’accomplissement des fonctions de la nutrition ? Mais, ne
révélez mes confidences à personne. Ce n’est pas pour moi que je vous
dis cela ; c’est pour vous-même et les autres, afin que le prestige du
secret retienne dans les limites du devoir et de la vertu ceux qui,
aimantés par l’électricité de l’inconnu, seraient tentés de m’imiter.
Ayez la bonté de regarder ma bouche (pour le moment, je n’ai pas le
temps d’employer une formule plus longue de politesse) ; elle vous frappe
au premier abord par l’apparence de sa structure, sans mettre le serpent
dans vos comparaisons ; c’est que j’en contracte le tissu jusqu’à la
dernière réduction, afin de faire croire que je possède un caractère
froid. Vous n’ignorez pas qu’il est diamétralement opposé. Que ne
puis-je regarder à travers ces pages séraphiques le visage de celui qui
me lit. S’il n’a pas dépassé la puberté, qu’il s’approche. Serre-moi
contre toi, et ne crains pas de me faire du mal ; rétrécissons
progressivement les liens de nos muscles. Davantage. Je sens qu’il est
inutile d’insister ; l’opacité, remarquable à plus d’un titre, de cette
feuille de papier, est un empêchement des plus considérables à
l’opération de notre complète jonction. Moi, j’ai toujours éprouvé un
caprice infâme pour la pâle jeunesse des collèges, et les enfants
étiolés des manufactures ! Mes paroles ne sont pas les réminiscences d’un
rêve, et j’aurai trop de souvenirs à débrouiller, si l’obligation
m’était imposée de faire passer devant vos yeux les événements qui
pourraient affermir de leur témoignage la véracité de ma douloureuse
affirmation. La justice humaine ne m’a pas encore surpris en flagrant
délit, malgré l’incontestable habileté de ses agents. J’ai même
assassiné (il n’y a pas longtemps !) un pédéraste qui ne se prêtait pas
suffisamment à ma passion ; j’ai jeté son cadavre dans un puits
abandonné, et l’on n’a pas de preuves décisives contre moi. Pourquoi
frémissez-vous de peur, adolescent qui me lisez ? Croyez-vous que je
veuille en faire autant envers vous ? Vous vous montrez souverainement
injuste... Vous avez raison : méfiez-vous de moi, surtout si vous êtes
beau. Mes parties offrent éternellement le spectacle lugubre de la
turgescence ; nul ne peut soutenir (et combien ne s’en ont-ils pas
approchés !) qu’il les a vues à l’état de tranquillité normale, pas même
le décrotteur qui m’y porta un coup de couteau dans un moment de délire.
L’ingrat ! Je change de vêtements deux fois par semaine, la propreté
n’étant pas le principal motif de ma détermination. Si je n’agissais pas
ainsi, les membres de l’humanité disparaîtraient au bout de quelques
jours, dans des combats prolongés. En effet, dans quelque contrée que je
me trouve, ils me harcèlent continuellement de leur présence et viennent
lécher la surface de mes pieds. Mais, quelle puissance possèdent-elles
donc, mes gouttes séminales, pour attirer vers elles tout ce qui respire
par des nerfs olfactifs ! Ils viennent des bords des Amazones, ils
traversent les vallées qu’arrose le Gange, ils abandonnent le lichen
polaire, pour accomplir de longs voyages à ma recherche, et demander aux
cités immobiles, si elles n’ont pas vu passer, un instant, le long de
leurs remparts, celui dont le sperme sacré embaume les montagnes, les
lacs, les bruyères, les forêts, les promontoires et la vastitude des
mers ! Le désespoir de ne pas pouvoir me rencontrer (je me cache
secrètement dans les endroits les plus inaccessibles, afin d’alimenter
leur ardeur) les porte aux actes les plus regrettables. Ils se mettent
trois cent mille de chaque côté, et les mugissements des canons servent
de prélude à la bataille. Toutes les ailes s’ébranlent à la fois, comme
un seul guerrier. Les carrés se forment et tombent aussitôt pour ne plus
se relever. Les chevaux effarés s’enfuient dans toutes les directions.
Les boulets labourent le sol, comme des météores implacables. Le théâtre
du combat n’est plus qu’un vaste champ de carnage, quand la nuit révèle
sa présence et que la lune silencieuse apparaît entre les déchirures
d’un nuage. Me montrant du doigt un espace de plusieurs lieues recouvert
de cadavres, le croissant vaporeux de cet astre m’ordonne de prendre un
instant, comme le sujet de méditatives réflexions, les conséquences
funestes qu’entraîne, après lui, l’inexplicable talisman enchanteur que
la Providence m’accorda. Malheureusement que de siècles ne faudra-t-il
pas encore, avant que la race humaine périsse entièrement par mon piége
perfide ! C’est ainsi qu’un esprit habile, et qui ne se vante pas,
emploie, pour atteindre à ses fins, les moyens mêmes qui paraîtraient
d’abord y porter un invincible obstacle. Toujours mon intelligence
s’élève vers cette imposante question, et vous êtes témoin vous-même
qu’il ne m’est plus possible de rester dans le sujet modeste qu’au
commencement j’avais le dessein de traiter. Un dernier mot... c’était
une nuit d’hiver. Pendant que la bise sifflait dans les sapins, le
Créateur ouvrit sa porte au milieu des ténèbres et fit entrer un
pédéraste.
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