Je sens une douceur à conter impossible,
Dont ravi je jouis par le bien du penser,
Qu’homme ne peut écrire, ou langue prononcer,
Quand je baise ta main contre Amour invincible.
Contemplant tes beaux rais, ma pauvre âme passible
En se pâmant se perd : lors je sens amasser
Un sang froid sur mon cœur, qui garde de passer
Mes esprits, et je reste une image insensible.
Voilà que peut ta main et ton œil, où les traits
D’Amour sont si ferrés, si chauds et si épais
Au regard Médusin, qui en rocher me mue.
Mais bien que mon malheur procède de les voir,
Je voudrais mille mains, et autant d’yeux avoir,
Pour voir et pour toucher leur beauté qui me tue.
Tandis que je parcours les mondes impossibles,
Un rêve à ma vision se trouve entrelacé ;
Une obscure planète aux océans glacés,
C’est là que me conduit ma chute irréversible.
Vers les côtes s’en vont des fleuves impassibles
Dont la crue peut soudain des villes effacer ;
Les rares habitants, s’ils en sont menacés,
Tirent de vilains mots de leurs coeurs irascibles.
Ceux qui naissent ici s’envolent sans regrets
Loin des lieux sur lesquels leur âme tire un trait ;
Des textes fort anciens narrent leurs aventures.
Repartirai-je un jour, je ne peux le savoir,
Par plusieurs faux passeurs je me suis fait avoir ;
Je trouve, en attendant, refuge en l’écriture.
C’est qu’il voudrait surtout nous émouvoir un peu
Larmoyer sur la fin refuge en l’écriture
Et pourquoi pas l’alcool pourquoi pas les injures
Loin du cœur sauve qui peut humain si pompeux !