Celui vraiment était et sage et bien appris,
Qui, connaissant du feu la semence divine
Être des animants la première origine,
De substance de feu dit être nos esprits.
Le corps est le tison de cette ardeur épris,
Lequel, d’autant qu’il est de matière plus fine,
Fait un feu plus luisant, et rend l’esprit plus digne
De montrer ce qui est en soi-même compris.
Ce feu donques céleste, humble de sa naissance,
S’élève peu à peu au lieu de son essence,
Tant qu’il soit parvenu au point de sa grandeur :
Adonc il diminue, et sa force lassée
Par faute d’aliment en cendres abaissée,
Sent faillir tout à coup sa languissante ardeur.
Les Regrets, 1558
Commentaire (s)
Déposé par Cochonfucius le 27 novembre 2017 à 11h58
Ornithocéphale
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Cet ornithocéphale a peu de chose appris ;
Du savoir il n’a point la semence divine,
Il n’examine pas quelle est son origine,
Il ne s’efforce pas d’embellir son esprit.
D’oiselle ou de dragonne il ne fut pas épris ;
Il s’en méfie, d’ailleurs, il les trouve trop fines.
Il n’a jamais goûté aux charmes d’une ondine,
C’est tout un univers qu’il n’a jamais compris.
Cet ornithocéphale, humble de sa naissance,
Ne sait pas définir son être ou son essence,
Il n’entretient jamais de rêves de grandeur.
Il vide une bouteille, et son âme lassée,
Par le traître breuvage en cendres abaissée,
Le prive tout à coup de sa vaillante ardeur.