Hugo


***

 
Sécurité du penseur


 
Ô Kant, l’âne est un âne et Kant n’est qu’un esprit.
 
Nul n’a jusqu’à présent, hors Socrate et le Christ,
Dans l’abîme où le fait infini se consomme,
Compris l’ascension ténébreuse de l’homme.
À force de songer son œil s’est éclairci ;
Plane plus haut encore, et tu sauras ceci :
 
Tout marche au but ; tout sert ; il ne faut pas maudire.
Le bleu sort de la brume et le mieux sort du pire ;
Pas un nuage n’est au hasard répandu ;
Pas un pli du rideau du temple n’est perdu ;
L’éternelle splendeur lentement se dévoile.
Laisse passer l’éclipse et tu verras l’étoile !
Le tas des cécités, morne, informe, fatal,
A l’éblouissement pour faîte et pour total ;
Le Verbe a pour racine obscure les algèbres ;
Les pas mystérieux qu’on fait les ténèbres
Sont les frères des pas qu’on fera dans le jour ;
L’essor peut commencer par l’aile du vautour
Et se continuer avec l’aile du cygne ;
Du fond de l’idéal Dieu serein nous fait signe ;
Et, même par le mal, par les fausses leçons,
Par l’horreur, par le deuil, ô Kant, nous avançons.
Querelle, petitesse, ignorance savante,
Tous ces degrés abjects dont ton œil s’épouvante,
Sont les passages vils par où l’on va plus haut ;
La lettre sombre, ô Kant, forme un splendide mot ;
Sans l’étage d’en bas que serait l’édifice ?
L’homme fait son progrès de ce qui fut son vice ;
Le mal transfiguré par degrés fait le bien.
Ne désespère pas et ne condamne rien.
Pour gravir le sublime et l’incommensurable,
Il faut mettre ton pied dans ce trou misérable ;
Un chaos est l’œuf noir d’un ciel ; toute beauté
Pour première enveloppe a la difformité ;
L’ange a pour chrysalide une hydre ; sache attendre ;
Penche sur ces laideurs ton côté le plus tendre ;
C’est par ces noirceurs-là que toi-même es monté.
Dieu ne veut pas que rien, même l’obscurité,
Même l’erreur qui semble ou funeste ou futile,
Que rien puisse, en criant : Quoi, j’étais inutile !
Dans le gouffre à jamais retomber éperdu ;
Et le lien sacré du service rendu,
À travers l’ombre affreuse et la céleste sphère,
Joint l’échelon de nuit aux marches de lumière.
 

L'Âne, 1880

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