Francis Jammes

De l'Angélus de l'aube à l'Angélus du soir, 1898


Confucius rendait les honneurs


 

À Christian Cherfils.


Confucius rendait les honneurs qui leur conviennent
aux morts, dans l’Empire bleu du Milieu.
Il souriait parce que l’eau éteint le feu
comme la Vie éteint l’homme vers l’époque moyenne.
 
Il n’ornait pas ses paroles merveilleusement
comme certaines coupes des Grands de l’Empire.
La tanche, qui est comme un vase de Pagode riche,
n’a pas besoin d’être ornée artistiquement.
 
Il allait avec une grande modestie au Palais,
écoutant sans colère les joueurs de flûte
qui adoucissent les sentiments comme la lune
adoucit, sur la montagne brûlée, les arbres violets.
 
Il parlait avec une respectueuse cérémonie
aux principaux de la ville et au chef de la guerre.
Il était bon, sans familiarité vulgaire,
avec les gens du commun et mangeait leur riz.
 
Il se plaisait aux choses de la Musique,
mais préférait les instruments de simple roseau
cueilli près des marais de vase douce et jaune
où l’oiseau sans nom qui fait yu-yu se niche.
 
Il se permettait, pour le bien de son estomac, les épices.
Il aimait, vers le soir, à discuter de belles sentences,
et il aurait voulu qu’on suspendît aux potences
qui servent aux lanternes, des moraleries.
 
Il parlait peu d’amour, davantage de la mort,
quoiqu’il déclarât que l’homme ne peut la connaître.
Il aimait voir les jeunes gens à la fenêtre,
les trouvant bien, à demi cachés par les ricins gris mais rouges.
 
Le soir il allumait des baguettes de parfum,
puis tournait gravement un moulinet où les prières
s’enlaçaient comme de belles pensées dans la cervelle
d’un jurisconsulte ou d’un poète de talent.
 
Il allait aussi voir les bâtiments de la Province,
se réjouissant de leur propreté et du bon ton
des navigateurs policés dont les réflexions
étaient profondes et claires comme le désert marin.
 
À ceux lui demandant des choses sur la chair,
Confucius dit : la vôtre est pareille à l’autre
et la mienne à la vôtre ; le sens de ceci est clair.
 
Puis il regarda en souriant son cercueil.
 

                                 
1895.

Commentaire (s)
Déposé par Cochonfucius le 18 septembre 2013 à 13h09


Le Maître Confucius honorait les tombeaux ;
Il arborait souvent un bienveillant sourire,
Disant « La circonstance aurait pu être pire » ;
Il savait que le feu s’éteint avec de l’eau.

Il n’ornait pas ses mots, mais on les trouvait beaux.
Il se tenait bien droit, face aux Grands de l’Empire,
Il mangeait le poisson qu’il savait faire frire
Et s’éclairait le soir d’un modeste flambeau.

Il recherchait la paix, ne craignait point la guerre,
Connaissait les vertus du noble et du vulgaire,
Et de la dialectique évitait les écueils.

Il parlait des sujets qu’il estimait connaître.
Quand la Mort s’approcha un jour de sa fenêtre,
Il montra, dans un coin du salon, son cercueil.

[Lien vers ce commentaire]

Votre commentaire :
Nom : *
eMail : * *
Site Web :
Commentaire * :
pèRE des miséRablEs : *
* Information requise.   * Cette adresse ne sera pas publiée.
 


Mon florilège

(Tоuriste)

(Les textes et les auteurs que vous aurez notés apparaîtront dans cette zone.)

Compte lecteur

Se connecter

Créer un compte

Agora

Évаluations récеntes
☆ ☆ ☆ ☆ ☆

Соppéе : «Lе sоir, аu соin du fеu, ј’аi pеnsé biеn dеs fоis...»

Сhéniеr : Сhrуsé

Klingsоr : Lа Ρоulе јаunе

Hаrаuсоurt : Αu tеmps dеs féеs

Dеspоrtеs : «Lе tеmps légеr s’еnfuit sаns m’еn аpеrсеvоir...»

Βruаnt : Соnаssе

Βruаnt : Соnаssе

Dеsbоrdеs-Vаlmоrе : «J’étаis à tоi pеut-êtrе аvаnt dе t’аvоir vu...»

Сrоs : Lеntо

Сосtеаu : Ρаuvrе Jеаn

☆ ☆ ☆ ☆

Τоulеt : «Νоus јеtâmеs l’аnсrе, Μаdаmе...»

Саrсо : Figаrо

Lесоntе dе Lislе : Lе Vœu suprêmе

Βаnvillе : Déсоr

Hugо : Rоndе pоur lеs еnfаnts

Ρаsquiеr : Сhаnsоn : «Νаguèrеs vоуаnt сеs bеаuх prés...»

Οrléаns : «Dеdаns mоn Livrе dе Ρеnséе...»

Сrоs : Sоnnеt métаphуsiquе

Rimbаud : Ρrеmièrе Sоiréе

Сrоs : Sоnnеt métаphуsiquе

Cоmmеntaires récеnts

De Сurаrе- sur Lе Sоnnеur (Μаllаrmé)

De Сосhоnfuсius sur «L’оisеаu dоnt l’Αrаbiе а fаit si grаndе fêtе...» (Lа Сеppèdе)

De Jаdis sur «Viсtоriеusеmеnt fui lе suiсidе bеаu...» (Μаllаrmé)

De Сосhоnfuсius sur Sоnnеt mоdеrnе (Riсhеpin)

De Gеоrgеs Lеmаîtrе sur «Lе sоir, аu соin du fеu, ј’аi pеnsé biеn dеs fоis...» (Соppéе)

De Сосhоnfuсius sur Sоnnеt : «Τоn соl surgit du sеin соmmе unе tоur d’ivоirе...» (Τаilhаdе)

De Jаdis sur Lе Vœu suprêmе (Lесоntе dе Lislе)

De Сurаrе- sur Sur lа Сrоiх dе nоtrе Sеignеur — Sа Саusе (Drеlinсоurt)

De Сurаrе- sur «Βаrquе, qui vаs flоttаnt sur lеs éсuеils du mоndе...» (Duplеssis-Μоrnау)

De Jаdis sur Sоnnеt d’Αutоmnе (Βаudеlаirе)

De Сhristiаn sur «J’еntrаis сhеz lе mаrсhаnd dе mеublеs, еt là, tristе...» (Νоuvеаu)

De Ρépé Hаsh sur «Сеpеndаnt qu’аu pаlаis dе prосès tu dеvisеs...» (Du Βеllау)

De Сurаrе_ sur Sоnnеt : «Quаnd је rеpоsеrаi dаns lа fоssе, trаnquillе...» (Gоudеаu)

De Сurаrе_ sur Lе Τоmbеаu dе Сhаrlеs Βаudеlаirе (Μаllаrmé)

De Vinсеnt sur Τоmbеаu du Ρоètе (Dеubеl)

De Xi’аn sur «Μоn âmе pаisiblе étаit pаrеillе аutrеfоis...» (Τоulеt)

De Lа Μusеrаntе sur Соntrе Ligurinus : «Τоut lе mоndе tе fuit...» (Dubоs)

De Vinсеnt sur «Un sоir, lе lоng dе l’еаu, еllе mаrсhаit pеnsivе...» (Durаnt dе lа Βеrgеriе)

De Xi’аn sur Lе Суgnе (Rеnаrd)

De Xi’аn sur «Sаintе Τhérèsе vеut quе lа Ρаuvrеté sоit...» (Vеrlаinе)

De Rоzès sur Lе Сinémа (Siсаud)

Plus de commentaires...

Flux RSS...

Ce site

Présеntаtion

Acсuеil

À prоpos

Cоntact

Signaler une errеur

Un pеtit mоt ?

Sоutien

Fаirе un dоn

Librairiе pоétique en lignе