Je ne suis de ceux-là que tu m’as dit se plaindre
Que leur Dame jamais ne leur donna martel ;
Vu l’âme véhémente, un dur martel m’est tel
Qu’il peut plus à la mort qu’à l’amour me contraindre.
S’il peut doncques l’amour avec ma vie éteindre,
En tout amour je chasse un poison si mortel ;
Puis ayant mon sujet haut, céleste, immortel,
Humble et petit, pourrais-je en moi tel mal empreindre ?
Mais las ! d’avoir peur d’être en ton cœur effacé,
Craindre qu’un Delta double en chiffre entrelacé
Ne soit plus pour mon nom, craindre qu’en ton absence
Tu ne me fasses plus tes lettres recevoir,
Ce n’est pas un martel, c’est d’amour le devoir
Qui montre en froide peur l’ardente révérence.
Beau basilic mural, tu n’es pas trop à plaindre :
Sur un mur de taverne ou sur un mur d’hôtel,
Un bienfaiteur, souvent, te dessine un cocktail
Car les buveurs, parfois, sont capables de peindre.
Si les lampes du bar en venaient à s’éteindre,
Tu ne sombrerais pas dans un ennui mortel,
Tu ne flétrirais pas tes jolis tons pastel,
Tu prendrais l’air content, sans nul besoin de feindre.
Et jamais ton portrait ne peut être effacé
Du mur parfois brûlant et quelquefois glacé,
Car l’aubergiste aurait regret de ton absence.
Tu as beaucoup d’amis que tu sais recevoir,
Eux qui sont rassurés et contents de te voir,
Faisant en arrivant leur humble révérence.