La Fontaine

Fables choisies mises en vers [Livres I-VI], 1668


Le Lion amoureux


 

                           
À Mademoiselle de Sévigné


Sévigné, de qui les attraits
Servent aux grâces de modèle,
Et qui naquîtes toute belle,
À votre indifférence près,
Pourriez-vous être favorable
Aux jeux innocents d’une Fable,
Et voir, sans vous épouvanter,
Un Lion qu’Amour sut dompter ?
Amour est un étrange maître.
Heureux qui peut ne le connaître
Que par récit, lui ni ses coups !
Quand on en parle devant vous,
Si la vérité vous offense,
La Fable au moins se peut souffrir :
Celle-ci prend bien l’assurance
De venir à vos pieds s’offrir,
Par zèle et par reconnaissance.
 
Du temps que les bêtes parlaient,
Les Lions, entre autres, voulaient
Être admis dans notre alliance.
Pourquoi non ? Puisque leur engeance
Valait la nôtre en ce temps-là,
Ayant courage, intelligence,
Et belle hure outre cela.
Voici comment il en alla.
Un Lion de haut parentage,
En passant par un certain pré,
Rencontra Bergère à son gré :
Il la demande en mariage.
Le père aurait fort souhaité
Quelque gendre un peu moins terrible.
La donner lui semblait bien dur ;
La refuser n’était pas sûr ;
Même un refus eût fait, possible,
Qu’on eût vu quelque beau matin
Un mariage clandestin.
Car outre qu’en toute manière
La belle était pour les gens fiers,
Fille se coiffe volontiers
D’amoureux à longue crinière.
Le Père donc ouvertement
N’osant renvoyer notre amant,
Lui dit : Ma fille est délicate ;
Vos griffes la pourront blesser
Quand vous voudrez la caresser.
Permettez donc qu’à chaque patte
On vous les rogne, et pour les dents
Qu’on vous les lime en même temps.
Vos baisers en seront moins rudes,
Et pour vous plus délicieux ;
Car ma fille y répondra mieux,
Étant sans ces inquiétudes.
Le Lion consent à cela,
Tant son âme était aveuglée !
Sans dents ni griffes le voilà,
Comme place démantelée.
On lâche sur lui quelques chiens :
Il fit fort peu de résistance.
Amour, amour, quand tu nous tiens,
On peut bien dire : Adieu prudence.
 

Commentaire (s)
Déposé par Cochonfucius le 26 novembre 2019 à 11h38

Sagesse d’un lion volant
----------

Ce lion peut s’envoler, les nuits de pleine lune,
Pour aller découvrir des mondes innommés ;
Mais il n’adore point leur auteur présumé :
C’est affaire de foi, mais il n’en garde aucune.

Il naquit dans un antre entouré par les dunes,
Et c’est un bel endroit qu’il continue d’aimer ;
Mais par les océans il est aussi charmé,
Qu’il survole en disant un bonjour à Neptune.

Avec Pluton, il parle en buvant de la bière ;
II aime des Enfers la paisible lumière
Et les chants des damnés aux lugubres accents.

Il peut à son goûter manger une antilope,
Mais ne dédaigne point une bonne escalope ;
Tel est le lion volant, un seigneur innocent.

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