André Lemoyne


Maîtres anciens


 
J’admire de plein cœur les peintres de Hollande
Qui, voyant la nature avec sincérité,
Restaient chez eux, trouvant leur patrie assez grande,
Et mouraient sous un ciel qu’ils n’ont jamais quitté.
 
J’aime surtout les fins et clairs paysagistes,
Dans les brumes du Nord maîtres si lumineux ! —
Ces profonds ingénus, humbles et grands artistes,
Assurément portaient une lumière en eux.
 
Bien peu leur suffisait : ils peignaient à leur guise
Un rayon de soleil s’arrêtant sur un pré,
Quelque moulin tournant de la Gueldre ou la Frise,
Un vieux hêtre d’automne au feuillage empourpré,
 
Ou de profondes cours d’ancienne hôtellerie. —
Ruysdaël, Van der Heyden, Hobbéma, Van der Meer,
Comprenaient la nature, ou sévère ou fleurie,
Et les hameaux des bois et les villes de mer.
 
Comme elles s’enfuyaient leurs vastes plaines basses
Où, flairant l’air salin, le tranquille bétail
Pâture avec lenteur les hautes herbes grasses,
Dans le flot de verdure où trempe son poitrail ;
 
Où, consultant des yeux l’atmosphère brumeuse
Qui s’éclaire dans l’Est, un grave ruminant
Regarde le soleil se lever sur la Meuse,
Dans les joncs et roseaux partout s’illuminant !
 
Et les maisons d’un port, dont les hautes rangées
S’éveillent à la fois dans le jour matinal,
Apparaissent au loin, clairement imagées,
Dans le calme et profond miroir d’un grand canal.
 
De vieux marins, fumant au seuil de leur cabane,
Qui, dans les mers du Sud, ont navigué longtemps,
Accompagnent des yeux dans le ciel diaphane,
Aux bords de l’horizon, les navires partants.
 
Partout le mouvement, la lumière et la vie,
L’idéal s’échappant de la réalité,
L’homme heureux de son être, et la bête ravie,
Dans un tout petit cadre où tient l’immensité.
 
 
 

II


 
À peindre la forêt, la prairie ou la dune,
Les braves gens gagnaient de minces revenus.
Le plus grand nombre, hélas ! ne faisait pas fortune,
Et quelques-uns d’entre eux expiraient inconnus.
 
Ils avaient travaillé simplement pour la gloire,
Mais la gloire pour eux venait longtemps après.
Leur nom comme un éclair illuminait l’histoire
Quand ils dormaient, depuis cent ans, sous les cyprès.
 
Qu’importe ! — Ils avaient dit ce qu’ils avaient à dire,
En langage précis, pittoresque et charmant,
Dans quelque page heureuse où chacun pouvait lire,
En prenant une part de leur enchantement.
 
Ils avaient achevé, dans une foi profonde,
Des œuvres de lumière et de joie et d’amour,
Léguant à l’avenir un petit coin du monde,
Qu’ils avaient éclairé d’un si merveilleux jour.
 

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