V’là la neig’ qui décanille,
Nom de Dieu, quel temps d’ cocus !
C’est à pein’ si j’ sens mes quilles,
Mes esgourdes j’ les ai plus.
 
C’ qui fait chaud, non c’est un’ paille,
J’ vas prend’ feu, pour sûr de sûr ;
Voyons... s’i’ m’ reste un’ médaille
J’ m’offrirai quéqu’ chos’ de dur.
 
J’ sors pourtant d’ boire un’ chopine
Pour fair’ couler un d’mi-s’tier,
Ça m’réchauff’ ben la poitrine,
Mais c’est mes saligauds d’ pieds !...
 
J’ suis frileux, c’est ma nature ;
J’ai la peau fin’ comme un roi,
Et j’ vous empoign’ des eng’lures
Rien qu’en rêvant qu’il fait froid.
 
Et p’is j’ n’ai qu’ des chaussett’ russes
Et mes rigadins prenn’nt l’air.
Ah, ben, vrai, c’ que j’ plains mes puces,
Ell’ pass’ront un sale hiver.
 
Allons, bon, à c’t’ heure, j’me plaque.
C’est pas ma faut’, c’est l’ verglas ;
Les omnibus et les fiac’
Font tant d’ bruit qu’on n’y voit pas.
 
Par exempl’ c’est ça un’ chance :
J’ dégot’ là-bas un troquet ;
Si j’allais, pendant qu’j’y pense,
Y plumer un perroquet ?...
 
Ben non, fau’ êtr’ raisonnable,
De depuis c’matin seul’ment
Des verr’ que j’ai bus, — probable —
J’ pourrai pas fair’ le r’censement....
 
Merde, alors... j’ramasse un’ pelle,
C’est c’cul-là qui m’a poussé...
T’en sers-tu rien qu’pour ta belle
D’tes châss’, eh... mauvais fumier ?
 
Attention... toi... eh, la môme !...
Ça qu’ tu vois c’est mes arpions...
Les prends-tu pour des fantômes ?
T’aurais d’l’imagination.
 
J’m’ai trompé, c’est un’ colonne :
J’vas y pleuvoir c’que j’ai bu...
... Par exemple... elle est bien bonne,
V’là maint’nant que j’la trouv’ plus.
 
... C’que ma femme’ va faire un’ gueule !
La vache, a’n’crach’ guère d’ssus
L’compartiment pour dam’ seules.
... Qué qu’j’en ai fait ?... Ah ! j’l’ai vu’ !!
 
C’est qu’j’avais déjà la frousse.
Pour me r’fair’ de c’t’ émotion
J’vas m’laver la gargarousse
Avec un’ petit’ potion...
 
C’est genti’ tout d’ mêm’ la neige
C’est-i’ gentil ? c’est-i’ blanc !
Il paraît qu’dans la Norvège
C’est comm’ ça tout l’temps, tout l’temps.
 
On dirait comm’ des espèces
De... pâquerett’... nom de Dieu,
V’là qu’j’en cueille avec mes fesses,
... J’dois avoir le cul tout bleu...
 
Assez comm’ ça d’poasie,
C’est bon pour le P’tit Journal ;
Moi, la neig’ ça m’attendri’,
Et ça m’fout un’ soif de ch’val.