Amour me tue, et si je ne veux dire
Le plaisant mal que ce m’est de mourir :
Tant j’ai grand peur, qu’on veuille secourir
Le mal, par qui doucement je soupire.
Il est bien vrai, que ma langueur désire
Qu’avec le temps je me puisse guérir :
Mais je ne veux ma dame requérir
Pour ma santé : tant me plaît mon martyre.
Tais-toi langueur : je sens venir le jour,
Que ma maîtresse, après si long séjour,
Voyant le soin qui ronge ma pensée,
Toute une nuit, folâtrement m’ayant
Entre ses bras, prodigue, ira payant
Les intérêts de ma peine avancée.
J’aime une fleur, son nom je ne peux dire,
Fleur qui rougeoie dans le soleil mourant ;
C’est son parfum qui me vint secourant
Au temps jadis, pour lequel je soupire.
Mon coeur, parfois, ne sait ce qu’il désire,
Coeur immature et coeur de vétéran
Que d’autres fleurs laissent indifférent ;
Car celles-ci ne sont que fleurs de cire.
Dans ce jardin qui change au fil des jours,
Mon âme fait un paisible séjour
Sans s’adonner à de sombres pensées ;
Car, les saisons fort nombreuses m’ayant
Fait découvrir ce qui est attrayant,
Je me délecte aux splendeurs nuancées.