Mon frère, je me porte bien,
La Muse n’a souci de rien,
J’ai perdu cette humeur profane ;
On me souffre au coucher du Roi,
Et Phébus tous les jours chez moi
A des manteaux doublés de panne.
Mon âme incague les destins,
Je fais tous les jours des festins ;
On me va tapisser ma chambre,
Tous mes jours sont des mardi-gras,
Et je ne bois point l’hypocras
S’il n’est fait avecque de l’ambre.
Théophile, dis-moi, tes affaires vont bien !
Nous voyons que le roi ne te refuse rien,
Que tu passes ton temps dans des plaisirs profanes,
Tranquille dans la veille et dormant sans effroi
Bercé du carillon d’un antique beffroi
Dont l’horloge, jamais, n’a souffert d’une panne.
Il est ainsi des temps préservés du destin
Où le moindre repas se présente en festin ;
Où l’on prend du plaisir dans de bonnes cambuses,
Ventre comme en aurait un chanoine bien gras.
Face à tant de bonheur, tu n’es pas un ingrat :
Tu fais de jolis chants, que t’inspire ta muse.