Renée Vivien

Chansons pour mon ombre, 1907


Viviane


 
Une odeur fraîche, un bruit de musique étouffée
Sous les feuilles, et c’est Viviane la fée.
 
Elle imite, cachée en un fouillis de fleurs,
Le rire suraigu des oiseaux persifleurs.
 
Souveraine fantasque, elle s’attarde et rôde
Dans la forêt, comme en un palais d’émeraude.
 
L’eau qui miroite a la couleur de son regard.
Elle se voile des dentelles du brouillard.
 
Parfois, une langueur monte de l’herbe et plane :
Les violettes ont salué Viviane.
 
Sa robe a des lueurs de perle et d’argent,
Son front est variable et son cœur est changeant.
 
Son pouvoir féminin s’insinue à la brume :
Elle devient irrésistible au clair de lune.
 
Des pâtres ont cru voir, de leurs yeux ingénus,
Des serpents verts glisser le long de ses bras nus.
 
À minuit, la plus belle étoile la couronne ;
Parfois elle est cruelle et parfois elle est bonne.
 
Et Viviane est plus puissante que le sort ;
Elle porte en ses mains le sommeil et la mort.
 
Plus que l’espoir et plus que le songe, elle est belle.
Les plus grands enchanteurs sont des enfants près d’elle.
 
Près d’elle, la mémoire est un rêve aboli.
Son magique baiser est plus froid que l’oubli.
 
Ses cheveux sont défaits et le soleil les dore.
Chaque matin, elle est plus blonde que l’aurore.
 
Ondoyante, elle sait promettre et décevoir.
Vers le couchant, elle est rousse comme le soir.
 
À l’heure vague où le regret se dissimule,
Elle a les yeux lointains et gris du crépuscule.
 
Lorsque le fil ambré du croissant tremble et luit
Sur les chênes, elle est brune comme la nuit.
 
Des rois ont partagé son palais et sa table,
Mais nul n’a jamais vu sa face véritable.
 
Elle renaît, elle est plus belle chaque jour,
Et ses illusions trompent le simple amour.
 
Elle erre, comme un vent d’avril, sous la ramée,
Et vous reconnaissez en elle votre aimée.
 
Elle est celle qu’on ne rencontre qu’une fois.
Écoutez... Nulle voix n’est pareille à sa voix.
 
Elle approche, et ses doigts effeuillent des corolles.
Vous tremblez... Vous avez oublié les paroles...
 
Mais vous savez — le bois merveilleux l’a chanté —
Qu’elle vous appartient depuis l’éternité.
 
Elle a changé de nom, de voix et de visage ;
Malgré tout, vous l’avez reconnue au passage.
 
Elle réveille en vous tous les anciens désirs.
À l’ombre de ses pas brillent des souvenirs.
 
Vous l’avez pressentie et vous l’avez rêvée
Longuement, et surtout vous l’avez retrouvée.
 
Elle trame pour vous des jardins et des ciels,
Et vous vous endormez en ses bras éternels.
 

Commentaire (s)
Votre commentaire :
Nom : *
eMail : * *
Site Web :
Commentaire * :
pèRE des miséRablEs : *
* Information requise.   * Cette adresse ne sera pas publiée.
 


Mon florilège

(Tоuriste)

(Les textes et les auteurs que vous aurez notés apparaîtront dans cette zone.)

Compte lecteur

Se connecter

Créer un compte

Agora

Évаluations récеntes
☆ ☆ ☆ ☆ ☆

Fоurеst : Εn pаssаnt sur lе quаi...

Βаnvillе : Lаpins

Сrоs : Sоnnеt : «Jе sаis fаirе dеs vеrs pеrpétuеls. Lеs hоmmеs...»

Jаmmеs : Si tu pоuvаis

Vеrlаinе : Éсrit еn 1875

Rоllinаt : Lа Vасhе blаnсhе

Соrbièrе : Ρаrаdе

Βаudеlаirе : Fеmmеs dаmnéеs — Dеlphinе еt Hippоlуtе

Vеrlаinе : «Gаspаrd Hаusеr сhаntе...»

Сеndrаrs : Μа dаnsе

Βоilеаu : Сhаnt Ι : «С’еst еn vаin qu’аu Ρаrnаssе...»

Βоilеаu : Сhаnt Ι : «С’еst еn vаin qu’аu Ρаrnаssе...»

☆ ☆ ☆ ☆

Ginеstе : Vеrs ехtrаits d’un pоëmе d’аmоur

Lаfоrguе : Νосturnе

Lаttаignаnt : Αdiеuх аu Μоndе

Vеrlаinе : Sоnnеt pоur lа Kеrmеssе du 20 јuin 1895 (Саеn)

Vеrlаinе : Épilоguе

Τаilhаdе : Quаrtiеr lаtin

Vеrlаinе : Dédiсасе

Rеnаrd : Νоuvеllе lunе

Viаu : Élégiе : «Сlоris, lоrsquе је sоngе, еn tе vоуаnt si bеllе...»

Vеrlаinе : À Gustаvе Lеrоugе

Cоmmеntaires récеnts

De Сосhоnfuсius sur «L’étоilе dе Vénus si brillаntе еt si bеllе...» (Μаllеvillе)

De Jаdis sur Саusеriе (Βаudеlаirе)

De Сосhоnfuсius sur Lа Vасhе blаnсhе (Rоllinаt)

De Сосhоnfuсius sur «Соurtisаns, qui trаînеz vоs јоurs déshоnоrés...» (Vаlléе dеs Βаrrеаuх)

De Βеаudеlаirе sur Βаudеlаirе

De Lе Gаrdiеn sur Virgilе (Βrizеuх)

De Jаdis sur Сrépusсulе (Соppéе)

De Jаdis sur Αu lесtеur (Μussеt)

De Rigаult sur Lеs Hirоndеllеs (Εsquirоs)

De Rigаult sur Αgénоr Αltаrосhе

De Jоël Gауrаud sur Αvе, dеа ; Μоriturus tе sаlutаt (Hugо)

De Huguеs Dеlоrmе sur Sоnnеt d’Αrt Vеrt (Gоudеzki)

De Un pоilu sur «Μоn âmе а sоn sесrеt, mа viе а sоn mуstèrе...» (Αrvеrs)

De Lе соmiquе sur Μаdrigаl tristе (Βаudеlаirе)

De Сhаntесlеr sur «Sur mеs vingt аns, pur d’оffеnsе еt dе viсе...» (Rоnsаrd)

De Gеоrgеs sur À lа mémоirе dе Zulmа (Соrbièrе)

De Guillеmеttе. sur «Lе bеаu Ρrintеmps n’а pоint tаnt dе fеuillаgеs vеrts...» (Lа Сеppèdе)

De Guillаumе sur Αbаndоnnéе (Lоrrаin)

De Lа Μusérаntе sur Hоmmаgе : «Lе silеnсе déјà funèbrе d’unе mоirе...» (Μаllаrmé)

De Сurаrе- sur Αdiеuх à lа pоésiе (Gаutiеr)

De Сurаrе- sur «J’еntrеvоуаis sоus un vêtеmеnt nоir...» (Μаgnу)

Plus de commentaires...

Flux RSS...

Ce site

Présеntаtion

Acсuеil

À prоpos

Cоntact

Signaler une errеur

Un pеtit mоt ?

Sоutien

Fаirе un dоn

Librairiе pоétique en lignе